Fêtes du raisin

Historique de la fête du raisin

La messe du raisin faisait partie du rituel de la Cathédrale de Fréjus dès la fin du VII ème siècle. L’ « indult » est confirmé par un bref pontificat du pape Jean XXII (élu en 1316), l’ancien Evêque de Fréjus, Jacques Duèze. Il consiste à donner le privilège à l’Archiprêtre de la Cathédrale de presser une grappe de raisin dans le Calice de la consécration, lors de la Grand-Messe du premier dimanche d’août. Ce jour-là, dans la Cathédrale Saint-Léonce, privilège unique de toute la chrétienté, du jus de raisin devient le sang du Christ.


Cet « Indult » se maintient même après l’abolition des rituels propres par le Concile de Trente et continue à être célébré, mais dans une semi-clandestinité à partir de 1791.


En 1960, le groupe de Maintenance traditionaliste, la « Miougrano » décide, avec l’accord de l’Evêque et celui de Rome, de redonner à cette messe un éclat public en la célébrant dans une atmosphère de fête.

L’autel est décoré de pampres. A l’offertoire, des membres de la Miougrano, en costume traditionnel, offrent le raisin. Le Prêtre choisit la grappe qui va être pressée dans le calice, où le jus de raisin se mélange au vin et à l’eau.

A l’élévation, danse de l’adoration et à la fin de la messe, sur le parvis, traditionnelle danse de la souche, suivie d’un spectacle de danses provençales et de la dégustation gratuite du vin du terroir, le plus vieux vignoble de France.


En ce jour, sur ce lieu, la danse, âme de la Provence et langage secret de la tradition, célèbre la messe du raisin, haut symbole spirituel, qui nous enseigne que nous devons, comme les grains de ce raisin, accepter de perdre notre forme charnelle pour atteindre Dieu.


En 1300, le chapitre de la Cathédrale de Fréjus, sur la très forte recommandation du Comte Roi Charles II le Boiteux (Comte de Provence Roi de Sicile), élit comme évêque Jacques Dueze, docteur "es utroque jure" (et précepteur des 13 enfants du roi et de son épouse Marie de Hongrie), un des hommes les plus érudits de son époque.


Un de ses premiers travaux est de consigner dans un livre, "le Directoire de l'Eglise de Fréjus", l'ordre des offices et des usages adoptés dans la Cathédrale pour les diverses fêtes de l'année.


Dans ces usages, il en est un d'extraordinaire. Le jour de la Sainte Sixte, le prêtre presse dans le calice quelques grains de raisin; ce jus de raisin non fermenté va, après la consécration, devenir, avec l'eau et le vin, le sang du Christ.


Promu cardinal en 1312 (Chancelier du Royaume à Naples en 1308, Archevêque d'Avignon en 1310), il fut élu Pape à Lyon le 7 août, et couronné le 5 septembre 1316, sous le nom de Jean XXII.


Il avait conservé pour son ancien diocèse de Fréjus une affection particulière, et confirma pour les deux cathédrales de St Léonce à Fréjus et St Sauveur à Aix, l'Indult de ce que nous appelons : "La messe du Raisin". Cette tradition s'est arrêtée à St Sauveur à Aix avec la Révolution. Par contre, elle s'est maintenue à Fréjus sans interruption, même dans les moments les plus difficiles de la lutte anti-religieuse, mais dans une semi-clandestinité. Dans la première moitié de ce siècle, elle était dite par Monseigneur Chaix, Prélat, Félibre et fervent défenseur des traditions provençales et fréjusiennes.


Il est à signaler que depuis le concile de Trente (1545-1563), la Messe était dite le jour de la Transfiguration et liée à cette grande fête, dont l’éclat avait éclipsé le souvenir de Sixte II. La fête de Sixte II, pape mort en 258, est actuellement, selon les diocèses, célébrée la veille ou le lendemain de la Fête de la Transfiguration.


Après la fondation de la Miougrano de Fréjus en 1959, nous avons voulu redonner force et éclat à toutes les anciennes traditions et donc dès 1960, à la Messe du Raisin et à "l'Ouferto Calendalo" à la messe de la nuit de Noël, dans la tradition des messes dansées.


A l'heure actuelle, la messe du Raisin et la Fête du Raisin qui est un peu devenue, en une quarantaine d'années, la fête mystique du groupe, se célèbre, avec l'accord de Rome, le dimanche le plus proche de la Fête de la Transfiguration et, selon les années, le 1er ou 2ème dimanche d'août.


L'autel de la cathédrale est décoré de pampres. A l'offertoire, des membres du groupe viennent offrir les corbeilles des premiers raisins. Le Prêtre choisit une grappe, qui est déposée sur l'autel aux côtés de la patène et du calice. Les grains de cette grappe sont pressés dans le calice par le prêtre officiant et, à l'élévation, les danseurs effectuent une danse d'adoration pour la présence de Dieu vivant dans le mystère de la transsubtantiation.

A la sortie de la messe, sur le parvis de la cathédrale se déroule la danse sacrée de la souche.


Ce rituel est ainsi de nos jours doublement lié à la fois au culte primitif du pape Sixte II et de ses diacres : Janvier, Magnus, Vincent et Etienne, martyrisés pendant le sacrifice de la messe, et dont le sang se mêla selon la tradition, à celui du calice, et au culte de la Transfiguration du Christ sur le Mont Thabor.


Dans cette double vue mystique, ces grains de raisin pressés pour devenir avec le vin le sang du Christ me semblent être le symbole de notre propre destin, de notre transfiguration. Il nous faut accepter, nous aussi, comme ces grains, d’être broyés et de perdre notre apparence charnelle pour que notre substance, notre « nous » profond, notre « essence » communie à la splendeur de Dieu.


Docteur Albert Ciamin

Cabiscaoù, fondateur de la Miougrano de Fréjù

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